L’insalubrité ternit la beauté de nos cités et accroit les vulnérabilités dans nos communes. Et pourtant, elles sont garnies de potentiels touristiques et climatiques naturels. La salubrité de la commune de Bingerville, ville intégrée désormais au district d’Abidjan, avec son lot de déchets qui pullulent les rues et les canalisations d’eaux usées, devient un sujet préoccupant pour ses habitants.
Lorsque je pose mes valises à Bingerville en 2014, au Sud-ouest d’Abidjan au bord de la lagune Ebrié, la commune s’étend face à une très forte croissance démographique à Abidjan. A cette époque, nous sommes convaincus que cette extension de la ville d’Abidjan s’effectuera avec un meilleur aménagement pour mieux valoriser l’environnement et réduire la pollution. Onze ans plus tard, regardez l’état dans lequel se trouve l’ancienne capitale entre 1900 et 1934. Une cité ayant abrité l’homme contemporain de l’Ogolien il y a 25 000 ans. Bingerville, fait partie des deux principaux sites ouest-africains, avec Iwo Eleru dans le Sud du Nigéria, qui élucident cette période géologique marquée aussi par l’extension du Sahara. En plus, cette commune dont le nom actuel provient du Gouverneur Français d’alors Louis-Gustave Binger, abrite des bâtiments historiques et des écoles de référence pour l’éducation de chaque citoyen au civisme et à l’humanisme.
En déménageant dans cette belle cité au quartier Porquet Résidentiel, mon objectif était de vivre dans cet environnement résilient, où la diversité culturelle, les valeurs citoyennes et intellectuelles entre en fusion avec un splendide aménagement naturel, dans ce vent frais que ce plan d’eau offre aux populations sans exclusive. Mon désir de profiter d’une telle ambiance naturelle avec ma famille a été déchanté, car tous les écoulements des eaux usées de la cité se déversent directement, sans traitement ni tri préalable, dans la lagune. Le résultat ? Une lagune Ebrié non seulement nauséabonde, mais aussi jonchée de déchets plastiques transportés par les caniveaux, lorsqu’ils ne sont pas déjà bouchés.
Bingerville n’est pas un cas isolé en Côte d’Ivoire. Il est grand temps que des mesures appropriées de gestion des déchets soient mises en place à proximité des populations. Cela commence par une sensibilisation des habitants et à la collecte des déchets. Comment peut-on concevoir que là où une pancarte « Interdiction de jeter des ordures » est placée, ce soit justement sous cette pancarte que les gens déversent leurs déchets ménagers ?
Il est certes facile d’installer des panneaux d’interdiction, mais les communes peuvent également veiller à installer des poubelles à chaque coin de rue pour éviter que les populations transforment toutes ces belles communes d’Afrique et de Côte d’Ivoire en dépotoirs. Sensibiliser les automobilistes, les commerces et chaque citoyen, tout en installant des dispositifs incitatifs à l’hygiène et la salubrité publiques. Nous pouvons passer de la pollution à une chaine d’actions de solution pour la santé de nos populations. En Côte d’Ivoire, l’État fournit des efforts pour améliorer la collecte des déchets et en mettant en place des solutions de recyclage. Cela s’inscrit dans notre engagement à réduire nos émissions de gaz à effet de serre pour atteindre une neutralité carbone d’ici 2050. Entre autres, le Centre de Valorisation et d’Enfouissement Technique (CVET) et la réhabilitation de la décharge d’Akouédo, illustrent mon propos. Seulement, le rapport entre les populations et leur environnement s’améliore grâce à une éducation au développement durable constante et une proximité d’actions quotidiennes ou d’infrastructures de traitement des déchets.
Les déchets abandonnés dans les rues sont des nids à moustiques. Ils contribuent à la pollution de l’air, à la propagation du paludisme et de la dengue. La fièvre lassa et typhoïde ou les maladies diarrhéiques affectent avec résurgence les populations d’Afrique de l’ouest faute d’une bonne gestion des déchets ménagers. Ce n’est donc pas surprenant que chaque année, la mortalité liée à ces maladies évitables reste alarmante, malgré les progrès de la médecine. La médecine seule ne pourra pas résoudre tous nos problèmes. Une éducation aux bonnes pratiques dans la gestion de nos déchets va enclencher une meilleure productivité sociale, en plus d’être favorable à la santé de tous. Tout comme, ce riche patrimoine de Bingerville présent sous nos yeux, l’histoire portera les traces de notre fierté à construire le bien être et participer à la salubrité dans notre société. Vivons sainement dans un environnement sain, car notre santé en dépend !